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Introduction à la musique dans la Grèce antique

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Introduction :

Bien que la musique existe depuis la Préhistoire, avec des instruments rudimentaires fabriqués à partir de matériaux naturels, ce sont les Grecs et les Mésopotamiens qui ont eu les premiers l’idée d’écrire la musique, par le biais de partitions mais aussi de descriptifs théoriques. Cela nous a permis de reproduire une partie des chants composés dans l’Antiquité. En dernier lieu, nous essaierons de comprendre pourquoi la musique antique sonne si différemment de celle d’aujourd’hui. Mais avant, intéressons-nous quelques minutes, si vous le voulez bien, à la manière dont la musique était enseignée en Grèce une vingtaine de siècles avant notre naissance.

I° L’enseignement de la musique dans la Grèce antique

Contrairement à la plupart des idées reçues, l’éducation des Grecs était artistique avant d’être scientifique, et en matière d’art, les jeunes Grecs apprenaient en premier la musique avant de se consacrer à la poésie, la sculpture ou l’architecture. Au fait…

Dis-moi, mon vieux Platon, qu’est-ce que tu en dis, toi, de la musique ?

« Hé bien, c’est très simple : tu veux que je te dise ? La musique est une loi morale. »

Ah bon ? Tant que ça ?

« Mais oui ! C’est bien la musique qui donne une âme à nos cœurs, des ailes à la pensée, un essor à l’imagination. Elle est un charme à la tristesse, à la gaieté, à la vie — à toute chose ! Et puis, elle est l’essence du temps, et s’élève à tout ce qui est de forme invisible, mais cependant éblouissante et passionnément éternelle. » @Platonofficiel, #musique, #trop génial, #trop cool.

Ainsi, les cours de musique étaient obligatoires pour les citoyens athéniens de plus de 13 ans. Ceux qui ne connaissaient rien en solfège étaient qualifiés soit d’esclaves, soit d’ignares. On y apprenait à chanter et à jouer de la lyre, une sorte de petite harpe que l’on tenait dans les mains. Vous avez sans doute déjà vu des lyres peintes sur certains vases grecs auparavant.

Pourtant, cet enseignement global n’avait pas pour objectif de former de grands musiciens ; l’apprentissage de la cithare, instrument ressemblant à la lyre mais plus élaboré, et ainsi considéré comme « professionnel », était réservé à ceux qui souhaitaient se lancer dans une carrière musicale. Ceux-ci recevaient un enseignement très différent : le plus souvent, la musique se transmettait de père en fils. Si aucun de ses ascendants n’était professionnel de la musique, l’adolescent pouvait faire appel à un maître, mais les cours particuliers de haut niveau étaient très coûteux.

Les musiciens professionnels jouaient dans des concerts et à l’occasion de fêtes et de cérémonies religieuses. On sait cela depuis que l’on a retrouvé les partitions de deux hymnes delphiques dédiés à Apollon. Cette divinité n’est pas choisie au hasard, souvenez-vous : le principal attribut d’Apollon est… la lyre !

II° Les instruments

Déjà dans l’Antiquité, on dénombrait une multitude d’instruments de musique.

Dans la famille des cordes, les instruments les plus communs étaient la lyre (dont on a déjà parlé plus haut), le barbiton (une « grosse lyre » qui produisait des sons plus graves), mais aussi la cithare, le phorminx utilisé par les aèdes, l’épigonion, le trigone et la pandoura.

Du côté des instruments à vent, le plus populaire était une flûte à deux tuyaux qu’on appelait « aulos ». Réservé comme la cithare aux musiciens professionnels, l’aulos était employé dans les banquets, les funérailles et les sacrifices, mais il était aussi bien utilisé pour rythmer les pas ou les mouvements de rame dans l’armée. Cet instrument cohabitait avec d’autres outils plus primitifs, comme la kéras qui était en fait… une simple corne de bouc, ou le kohlos, aussi appelé « conque », qui était un coquillage. Enfin, il existait aussi le syrinx, le salpinx et l’hydraulos. Pour vous donner une idée de ce à quoi ces instruments ressemblaient, le syrinx est à la flûte de Pan ce que le salpinx est à la trompette. L’hydraulos est, comme les mordus d’étymologie l’auront deviné, un orgue hydraulique, en fait le premier orgue de l’histoire, qui a été inventé par Ctésibios au IIIe siècle avant Jésus-Christ.

Avant de clore cette partie, passage obligé par les percussions pour marquer le rythme des chants. Les cymbales sont encore utilisés de nos jours dans les orchestres. Il y avait aussi les crotales (oui, oui, comme les serpents), le tympanon qui a évolué pour devenir le tambourin, et enfin, le sistre.

III° La notation et les premières partitions

Malgré une écriture musicale abondante pour l’époque, seulement une soixantaine de partitions datant de la Grèce antique ont été retrouvées. La plus ancienne ayant été découverte est l’épitaphe de Seikilos ; on pense qu’elle a été écrite entre le Ier et le IIe siècle de notre ère. Ainsi, dès les premières découvertes de partitions de musique antique sur des papyrus, des tombeaux ou des colonnes, on a tenté de reconstituer tous ces chants. Parmi les nombreux acteurs de ces retranscriptions contemporaines, l’ensemble de musique Kérylos fondé par Annie Bélis est le plus connu.

Pour écrire la musique, les Grecs faisaient habituellement usage du système pythagoricien (car oui, Pythagore, grand savant de l’époque, est aussi connu pour avoir découvert les lois de l’harmonique). Les gammes chromatiques ne comptaient pas 12 notes comme aujourd’hui, mais 24 ; cela leur permettait de produire des sons intermédiaires, par exemple entre le do et le do dièse.

Pour la partie chantée, chaque note était représentée par une lettre grecque inscrite au dessus des paroles, puisqu’il y avait 24 notes et que l’alphabet grec comptait… 24 lettres, merci beaucoup, c’était dur, hein ? Le rythme était représenté par des points et des traits au dessus des notes, un trait (une « longue ») équivalant à deux points (« brèves »).

Dans l’Antiquité comme de nos jours, les différentes façons de construire une gamme sont appelées « modes ». Les « modes » sont toujours employés aujourd’hui, mais à l’époque, ceux-ci avaient prétendument des effets bien précis sur l’âme ; c’est ce que l’on nommait l’« éthos spirituel ». Ainsi, le mode dorien était austère, l’hypodorien fier et joyeux, l’ionien voluptueux, et cetera.

Avant le XVe siècle, on préférait employer les octaves, les quintes et les quartes, car les tierces majeures sonnaient faux pour des raisons scientifiques. À cela, on enlevait aussi la quinte la bémol – mi bémol qui était généralement la quinte dite « du loup » et qui sonnait faux pour les mêmes raisons. Ainsi, on avait une gamme juste mais incomplète, et cela restreignait, en quelque sorte, les libertés des compositeurs. La musique n’était donc pas très variée en ces temps de découvertes ; c’est pourquoi l’on entend souvent les mêmes notes dans différents morceaux de cette ère.

La culture musicale grecque aura existé jusqu’à l’arrivée des Romains en Orient.

IV° Bibliographie / sitographie

Une vidéo de présentation générale de la musique dans la Grèce antique a été tournée par Marc Tairraz, chef d’orchestre et professeur de violon : à voir sur youtu.be/2yHobEqUEGs.

Pour la première partie sur l’enseignement musical, ma principale source est une vidéo sur l’histoire de la musique réalisée par Megan Borelli (lien direct : youtu.be/YTARtoj5D8c).

Une liste très complète des instruments de musique utilisés dans la Grèce antique m’a été fournie par cet article de blog : actu-histoireantique.over-blog.com/page-4174307.html.

Pour découvrir comment les Grecs écrivaient la musique, cet article de Claire Tuan (lespierresquiparlent.free.fr/hymneAthenaios.html) m’a été d’une très grande aide.

Je vous invite fortement à consulter le site officiel du groupe Kérylos, kerylos.fr.

Pour approfondir sur le lien entre les sciences et la musique avant le XVe siècle (et après), voir cette vidéo de David Louapre (de la chaîne YouTube « Science étonnante ») en collaboration avec Vled Tapas : youtu.be/cTYvCpLRwao.

Merci de m’avoir lu si assidûment !

N’hésitez pas à me poser des questions si vous le souhaitez.

Écouter le podcast au format MP3

Deux choses que je ne vous ai pas encore montrées…

… mais pas moins intéressantes que le reste 🙂

  • Le blog de mon TPE (Travail Personnel Encadré) de Première Scientifique, en collaboration avec Louise COLAS et Clémence NOTTEZ, sous la tutelle de Marc BEZIZ et Anne LAURIOL : https://paquet.info/tpe
  • Le blog de mon premier voyage en Grèce dans le cadre de mes cours de grec ancien, qui s’est déroulé du 12 au 18 octobre 2019 : https://paquet.info/grece

Bon surf… et bonne année 2020 !! ◼