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Le travail des formes

Bonjour !

Comme vous le savez peut-être déjà, je suis depuis septembre 2020 en prépa littéraire A/L (hypokhâgne-khâgne). Cette année, le programme de philosophie pour le concours d’entrée aux écoles normales supérieures littéraires est « l’art, la technique ». Je viens de terminer avec ma classe la séquence sur l’art, et je tenais à vous partager ma dissertation sur le sujet (Le travail des formes), à laquelle j’ai eu la très bonne surprise d’avoir 15/20 (note assez unique dans une scolarité normale en prépa…).

Je me suis permis de l’arranger légèrement en tenant compte des multiples annotations de mon professeur, M. Philippe Jullien.

Bonne lecture !

Introduction

En 1915, le peintre Kasimir Malevitch peint un carré noir sur une toile blanche et l’expose directement parmi ses autres œuvres, se lançant à son tour dans la voie avant-gardiste de l’art non représentatif ouverte par Kandinsky. Ce tableau, s’il peut être regardé platement comme une nouvelle provocation dans la lignée de la Fontaine de Duchamp, fait en réalité penser à une multitude de concepts. On peut y voir la délimitation arbitraire de quelque chose de précis, ou du moins sensible, dans un univers immaculé, indifférent, énigmatique et peut-être même vide. On pense à ce vide et par là même à l’idée générale du vide, de l’absence, on pense à la mort et au manque qu’elle laisse en nous. Dès lors, si les œuvres d’art peuvent être envisagées sous l’angle d’un ballet formel qui possède une certaine gratuité, elles sont en même temps le fruit d’un travail, d’une réflexion sur « Dieu, l’âme et le monde », comme le dit Hegel dans son Esthétique.

Le « travail des formes » est un paradoxe dans la mesure où le premier sens du mot « travail » est le processus de production d’un objet technique, donc utilitaire, par une série bien définie de règles et de méthodes, pour le rendre conforme à un concept pensé à l’avance. S’il faut bien que les objets aient des formes, ces dernières correspondent à une fonction. En art, le travail des formes est un travail sans fonction. Les artistes travailleraient donc à une chose vaine, futile, accessoire. Pourtant, nous pouvons avoir d’autres rapports aux éléments de notre univers que le seul rapport pragmatique, puisque les interrogations existentielles n’ont pas cessé de « travailler » l’esprit humain. Par ailleurs, il est temps de considérer l’expression « travail des formes » également comme le travail que les formes exercent sur nous – spectateurs, auditeurs, lecteurs ou public – et particulièrement sur notre jugement de goût, qui n’est peut-être pas aussi subjectif qu’on le croit.

Comment l’art parvient-il à appeler des notions abstraites et réveiller des interrogations philosophiques à partir d’un support matériel et ouvragé ?

Comme tout « art » dans le sens étymologique du terme, la création esthétique suppose un travail des matériaux, car les œuvres d’art sont des objets concrets. En revanche, ce travail est une poïèsis et non une tèknè, car notre rapport à l’œuvre n’est pas pragmatique. Enfin, l’art lui-même, par son rapport au formel, travaille le public et travaille même sur ses jugements de goût.

I. Le travail des formes est indispensable en art

L’œuvre d’art se signale toujours par un objet concret qui n’est pas issu directement de la nature. Il y a toujours la nécessité d’un travail technique, non seulement pour l’exposer, mais aussi pour la créer. Kant et Hegel sont d’accord avec le fait que « l’art est la manifestation sensible d’une idée » ; mais tandis qu’Hegel insiste sur l' »idée », Kant montre que la manifestation sensible est prioritaire dans le pouvoir de captation que l’œuvre a sur son public. Ainsi, l’œuvre d’art est d’abord un objet matériel qui doit être travaillé pour attirer l’attention, avant de pouvoir déverser son flot d’images.

De fait, il faut des règles pour élaborer une œuvre d’art. L’art est en effet un « libre jeu » (freier Spiel) impliquant d’une part des « idées esthétiques », de l’ordre de l’imagination, et d’autre part des « Idées de la raison », comme l’idée de Dieu, de l’âme ou du monde. C’est ce qu’écrit Kant dans sa Critique de la faculté de juger. Le processus créatif commence par l’arrivée d’un flot d’idées imaginatives qui est ensuite contrôlé et organisé par l’entendement. Par exemple, pour composer « L’Été » de ses Quatre saisons, Vivaldi a d’abord des idées musicales, puis il choisit les instruments et organise ses idées conformément au concept d' »été ». Ainsi, le sens est nécessairement subordonné à la forme. Si le flux imaginatif n’est pas contrôlé par l’entendement, on obtient un gribouillis ou de l’écriture automatique ; or ces genres n’ont jamais donné des chefs-d’œuvre.

Enfin, Platon, dans La République, pointe une analogie entre la création artistique et le travail technique. En effet, il considère que les deux vont dans le même sens : celui d’une dégradation d’un objet supérieur, plus pur, plus idéal. La production d’une œuvre d’art imitative est une dégradation de l’objet qu’elle représente, objet qui est lui-même une dégradation de l’eïdos qui est la vraie chose. Cependant, dans Ion, le même Platon affirme qu’il y a quelque chose dans l’art qui ne peut pas se réduire à un simple travail technique. Ce qu’il appelle la parole d’un dieu est le « don de Dieu » dont parle Mozart et ce que Freud attribue à l’inconscient ; tous désignent en fait une même idée : la part de la création artistique qui ne relève pas du domaine technique.

Ainsi, comme toute œuvre d’art nécessite un support matériel, et comme le flux imaginatif doit être maîtrisé par les règles de l’entendement, la création artistique passe par un travail des matériaux concrets (par exemple, les instruments de musique) et abstraits (les idées esthétiques). Néanmoins, ce travail n’est pas purement technique, car il ne s’intéresse qu’aux formes, sans but déterminé. D’autre part, si l’art était une technique, le respect de règles esthétiques pourrait suffire pour produire le beau. Nous pourrions tous être des artistes de génie ! Or, ce n’est pas le cas. Les dessins de Charles Le Brun, qui tendent à respecter scrupuleusement toutes les règles classiques, s’avèrent accidentellement comiques (cf. la représentation du désir). En art, le travail des formes dépasse donc le simple travail technique.

II. Le travail des formes nécessaire à la création artistique n’est pas de type technique

La création artistique s’apparente davantage à une poïèsis qu’à une tèknè. Sinon, l’objet d’art serait un objet technique.

Il existe en effet plusieurs différences constitutives entre un objet d’art et un objet technique. D’une part, nous n’avons pas un rapport pragmatique aux objets d’art. Heidegger explique que là où l’on impose à l’objet technique de ne pas se signaler quand on l’utilise, dès lors qu’il est représenté en peinture, il nous parle directement et non à travers l’usage qu’on en fait. Par exemple, les modestes souliers peints par Van Gogh documentent, contrairement aux vrais sabots, le dur labeur de l’Homme attaché par contrainte à la Terre pour survivre. Par le travail des formes, l’objet d’art nous parle donc tout différemment que l’objet technique, car le second reste attaché à l’usage qu’on fait de lui tandis que le premier nous parle directement.

Ensuite, la beauté de l’art tient à tout ce qu’il y a de non représentatif en lui. S’il y a trop de règles, un roman à thèse n’est qu’une dissertation. Dans la Critique de la faculté de juger, Kant définit l’art comme une « finalité sans fin » qui offre un flot d’images organisé, sans qu’on sache d’où il vient ni quel est son but. Dès lors, l’art abstrait n’apparaît non plus comme une provocation, mais comme une mise au jour de ce que l’art a toujours été sans le savoir. Ainsi, la statue Apollon et Daphné du Bernin, immortalisant la tentative de viol de Daphné par Apollon au moment où celle-ci commence à se transformer en laurier, est admirée aujourd’hui surtout pour le travail sur les mouvements, qui met en exergue la confrontation d’une multitude d’élans vitaux contradictoires : le désir sexuel, la pulsion de mort ou d’anéantissement, le pouvoir divin sur les hommes et leur attachement consubstantiel à la terre tout comme le statut provisoire de l’état de vie. Ainsi, le travail des formes évite le rapport pragmatique à l’œuvre en suscitant des réflexions sur sa nature même.

Enfin, le privilège qu’ont les formes dans le pouvoir de captation sur nous montre que l’on ne pense pas en termes de but et de fin face à une œuvre d’art. Nous venons donc à l’œuvre de manière désintéressée, ce que le rapport pragmatique interdit puisque tout objet technique est conçu en fonction d’un besoin.

Ainsi, la création artistique, si elle passe par un travail des formes, ne vise pas une relation pragmatique entre l’œuvre et son public. L’art, qui est d’abord un ballet formel appelant un plaisir désintéressé, parle pourtant au spectateur et fait même mûrir des réflexions profondes en lui, tout en « travaillant » son jugement esthétique.

III. L’art lui-même, par son travail des formes, agit sur le public

D’abord, il ne peut pas y avoir de critère objectif pour le jugement esthétique, car nous avons vu qu’il ne peut y avoir de règle objective pour créer. Le jugement de goût semble alors purement subjectif. Pourtant, des consensus existent quant au jugement de plusieurs œuvres, comme celles d’Homère, de Shakespeare, de Molière ou de Mozart. Il n’y a qu’à écouter comment les critiques jugent les artistes (et techniciens) contemporains à l’aune de ces figures globalement reconnues comme talentueuses (par exemple : « C’est un Mozart de l’informatique ») pour s’en rendre compte. Hume, dans La Règle du goût, fait cette observation et en conclut que l’on peut travailler pour affiner son goût en se confrontant assidument à un certain type d’œuvres ou en pratiquant un art. Ainsi, les œuvres travaillent sur nous et nous permettent de réviser notre jugement esthétique à partir d’une première expérience difficile avec une œuvre de ce type.

D’autre part, les discussions sur les jugements de goût eux-mêmes travaillent sur nous. Kant, dans la Critique de la faculté de juger, montre même que ces débats améliorent notre moralité. Nul ne peut reconnaître les jugements des autres comme universellement vrais et démontrables, car il n’y a pas de critère objectif pour le jugement de goût. Néanmoins, une confrontation de mon jugement à celui des autres peut me faire prendre conscience que, par exemple, ce que je trouve brillant et magnifique à la fin d’une pièce de théâtre est finalement un peu lourdaud ou « cliché ». Les œuvres d’art, donc, par de simples formes, travaillent notre jugement esthétique lors des discussions qui permettent de les confronter.

Conclusion

En définitive, l’art est le produit d’un travail, car il utilise des supports (les matériaux, les instruments, l’entendement) pour se fixer et se présenter à un public. Cependant, l’œuvre d’art est toute différente d’un objet technique, car elle n’a pas de fin et nous n’avons pas un rapport d’usage mais a contrario de plaisir désintéressé avec elle. Enfin, ce ballet des formes évoque mille significations qui agissent sur nous, en affinant notre goût ou en confrontant notre jugement à celui d’autrui dans un espoir de trouver des critères objectifs. L’art nous rend donc plus moraux sans parler de moralité, comme pour remercier son créateur de lui avoir donné « forme ». ■

L’Europe après la Pluie

En pleine Seconde Guerre Mondiale, l’artiste franco-allemand Max Ernst peint son dégoût de la guerre, par l’image d’un paysage rongé par la tristesse et l’angoisse.

Titre : L’Europe après la pluie
Artiste : Max ERNST
Date : 1942
Dimensions : 148,2 x 54,9 cm
Matériaux : couleurs, papiers
Support : toile
Technique : décalcomanie
Localisation : Wadsworth Atheneum Museum of Art, Hartford, Etats-Unis.

Ce tableau nous rend triste, nous désole. Tout semble détruit, déstructuré. Les tons de rouge et de gris transmettent de la souffrance et du désespoir. Ce paysage semble sorti de nulle part, il paraît inimaginable…ou du moins très lointain.

Mais au fait, qui est Max Ernst ?
Maximilien Ernst, né le 1er avril 1891 à Brühl, en Allemagne, et mort le 2 avril 1976 à Paris, est un essayiste et explorateur de l’art, en raison de ses multiples idées de créer des propos innovateurs pour le redéfinir. Peintre avant tout, mais aussi sculpteur et écrivain, il est considéré comme le précurseur, sinon l’un des artistes les plus influents des mouvements Dada et surréaliste. À la recherche constante de perfection dans les procédés artistiques qu’il utilise, il invente le « frottage », le « grattage », le « roman collage », des techniques qui s’apparentent à l’écriture automatique des surréalistes.
Max baigne dans l’univers artistique depuis sa tendre enfance, son père étant peintre. D’abord étudiant en philosophie, il abandonne ses études pour se consacrer uniquement à l’art. Il s’imagine alors faire revivre le collage du mouvement cubiste pour réaliser ses œuvres dadaïstes (issues du mouvement Dada). Il rejoint un groupe expressionniste et expose pour la première fois à Cologne en 1912, avant de partir pour Paris en 1913. Durant la Première Guerre Mondiale, Max Ernst sert dans l’armée allemande. En 1922, après avoir fondé le groupe dada de Cologne, qu’il revient à Paris et mène une carrière prolifique. Il expose ainsi au salon des Indépendants en 1923 et aux États-Unis en 1934. La Seconde Guerre mondiale conduit à l’arrestation de Max Ernst en 1939. Il réussit néanmoins à quitter la France et à rejoindre les États-Unis en 1941, où il travaille à l’expressionnisme abstrait. Onze ans plus tard, Max Ernst revient en France et se voit décerner le Grand Prix de la Biennale de Venise, qui conduit cependant à son exclusion du mouvement surréaliste. Il quitte alors définitivement Paris en 1955, mais continue ses créations. De nombreuses rétrospectives lui sont dédiées avant sa mort.

A présent, analysons ce tableau…
Le tableau montre un paysage chaotique, ravagé par une tempête particulièrement destructrice. L’artiste a voulu représenter ici l’horreur de la guerre, qui a tout ravagé sur son passage. Tout semble démoli, détruit, revenu d’un épisode extrêmement destructeur, qu’est la guerre (notons les innombrables débris qui jonchent le sol, ainsi que les roches et les êtres représentés dans un état lamentable). Les couleurs chaudes et sombres de ce tableau relèvent également de la souffrance. Les cadavres au sol représentent sans aucun doute le nombre astronomique de morts qu’a fait la Seconde Guerre Mondiale, comprenant les soldats, les civils, les Juifs, les Tziganes, etc. Le sommet de la roche centrale forme un buste féminin dans une longue robe, ce que l’on peut interpréter comme le point de vue de l’artiste sur la baisse importante de la population active de l’Allemagne (hommes en bonne santé entre 20 et 60 ans), donc la place croissante des femmes dans la société. L’abri tombant en ruine, attaché à la créature mi-homme mi-oiseau, symbolise peut-être l’état de la résistance, qui continue de combattre contre les nazis, malgré sa minorité et son instabilité. Le « saule pleureur » situé à droite en premier plan représente sans doute la tristesse des familles des soldats, civils ou Juifs tués dans la guerre. Max Ernst imagine donc l’état du paysage et de la société allemandes après la « pluie », soit la guerre. Le ciel haut et clair peut représenter le mince filet d’espoir, d’optimiste toujours présent après la guerre, même si l’on peut penser en majorité que tout est fini.

Dans quel contexte notre cher Max a-t-il peint son œuvre ?
En 1942, l’Europe est plongée dans la Seconde Guerre Mondiale. Certains artistes de l’époque expriment leur dégoût, leur pacifisme pour ce long conflit destructeur.
Max Ernst appartient au mouvement surréaliste. C’est un mouvement artistique et littéraire qui naît en France avant de s’étendre à l’Europe. Il est, à l’origine, proche du dadaïsme. L’orientation esthétique est théorisée en 1924 par l’écrivain André Breton (1896-1966) dans le premier Manifeste du Surréalisme. Les surréalistes sont influencés par la psychanalyse et l’univers du rêve. Les sujets picturaux se caractérisent pas d’étranges associations d’éléments qui donnent à voir ce que seule l’imagination peut créer : des mondes extraordinaires ou des réalités impossibles. On les retrouve dans l’œuvre de Max Ernst (1891-1976), Loplop présente une jeune fille (1930, Paris, Musée National d’Art Moderne) ou dans celle de Salvador Dali (1904-1989), Hallucination partielle. Six apparitions de Lénine sur un piano (1931, Paris, MNAM).
En 1942, toute l’Europe est occupée par l’Allemagne. Toute ? Toute ! Mais autour ? Deux pays peuplés d’irréductibles résistent encore et toujours à l’envahisseur : l’URSS et le Royaume-Uni. C’est également en 1942 qu’a lieu la conférence de Wansee, entraînant avec elle la mise en place des camps d’extermination réservés aux Juifs et aux Tziganes « recueillis » dans les pays occupés. Enfin, à partir de juin 1941, l’Allemagne attaque l’URSS, et en juillet 1942 a lieu la bataille de Stalingrad, où les russes s’en sortiront vainqueurs. Le Reich allemand est donc en pleine position d’attaque au moment où Max Ernst peint L’Europe après la pluie.

En conclusion ?
Max Ernst, par l’image d’un paysage et d’êtres ravagés par une « pluie » meurtrière, représente donc l’horreur de la guerre totale qui s’abat sur l’Europe à partir de 1939. Ce tableau suscite de la tristesse, du désespoir, de la désolation, et une vague impression de lointain, d’irréalité chez le spectateur.
Pendant la Seconde Guerre Mondiale, plusieurs artistes ont exprimé leur pacifisme. C’est le cas de Pablo Picasso, Otto Freundlich, Victor Brauner, Joseph Steib, Otto Dix, Charlotte Salomon, Boris Taslitzky, Georges Rouault (Homo Homini Lupus (Le pendu), 1944) et bien d’autres. Sur le thème de l’extermination, plus précisément la Shoah, citons Boltanski et David Olere. Néanmoins, on ne retrouve aucune œuvre de 1942 qui « anticipe » sur le concept d’anéantissement. La plupart sont postérieures à la guerre. Elles peuvent porter sur la Shoah mais aussi sur les bombes atomiques comme une œuvre musicale : Thrène à la mémoire des victimes d’Hiroshima de Penderecki. D’autres parlent de la guerre du Pacifique, comme le roman de Akiyuki Nosaka La tombe des lucioles (1967), qui a donné vingt ans plus tard un film d’animation, Le tombeau des lucioles, réalisé par Isao Takahata.

Sources
Carte d’identité de l’œuvre : lewebpedagogique.com/waltersubtil/files/2010/02/fiche-HDA-max-Ernst.pdf
Biographie de Max Ernst : www.linternaute.com/biographie/max-ernst/, www.le-surrealisme.com/max-ernst.html
Contexte historique : Mon cours d’histoire de troisième
Courant artistique : sites.google.com/site/brevethistoiredesartscescamus/les-courants-artistiques
Conclusion (œuvres postérieures) : culturebox.francetvinfo.fr/arts/expos/l-art-dans-la-deuxieme-guerre-mondiale-oeuvres-choisies-127741, fiche artiste (cours de troisième).

La la land, Damien Chazelle (2016)

Bonjour à tous !

En décembre dernier, je suis sorti au cinéma avec ma famille, un peu comme d’habitude, et je ne m’attendais pas à voir quelque chose de particulièrement extraordinaire. Au bout de deux heures de projection, quand je suis sorti de la salle, j’étais littéralement ébloui. En fait, j’étais tombé sur ça :

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La La Land est un film musical américain écrit et réalisé par Damien Chazelle, mis en musique par Justin Hurwitz et interprété par Ryan Gosling et Emma Stone. Il est sorti en décembre 2016 aux États-Unis et en janvier 2017 en France. Présenté en ouverture de la Mostra de Venise en août 2016, le film remporte un succès critique. Emma Stone, l’actrice principale, obtient quant à elle la Coupe Volpi de la meilleure interprétation féminine. En janvier 2017, lors de la 74e cérémonie des Golden Globes, La La Land reçoit un record historique de sept récompenses, avant de recevoir quatorze nominations pour les Oscars 2017, égalant ainsi le record historique de Ève et de Titanic. Il remporte six des statuettes, dont celles du Meilleur Réalisateur pour Damien Chazelle et de la Meilleure Actrice pour Emma Stone, ainsi qu’une double consécration pour le compositeur Justin Hurwitz.
(fr.wikipedia.org/wiki/La_La_Land_(film))

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Les grandes lignes

Cette comédie romantique, que j’ai vu il y a un mois déjà, se résume au schéma suivant : féérie (rencontre amoureuse) -> réalisme (déception). Vous avez compris que je pense un peu au Grand Meaulnes. Cependant, le titre et l’affiche semblent plutôt accentuer le côté onirique de l’intrigue : « un titre simple comme les premiers mots d’une chanson fredonnée, un titre qui dit tout sans besoin de traduction et qui laisse deviner avec malice les milles et une couleurs d’un feu d’artifice en cinémascope et en technicolor. […] La course sera éblouissante et le voyage digne d’un aller-retour sur la lune », décrit le cinéma Utopia de Montpellier. (cinemas-utopia.org/montpellier/index.php?id=2059&mode=film)

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Les références aux comédies musicales hollywoodiennes

J’ai beaucoup aimé ce film empli de clins d’œil amicaux à toute la clique de la comédie musicale hollywoodienne, de l’après-guerre aux années 70. La fin est assez surprenante car elle révèle le message principal du film, et affaiblit le rêve américain de « réaliser ses rêves à tout prix »…

On peut remarquer qu’un grand travail a été fait sur l’élaboration de la musique ; le compositeur passe de la joie de vivre (Another Day of Sun) à la mélancolie pure et simple (Mia and Sebastian’s Theme) avec une virtuosité remarquable. A noter également, un gros travail qui a dû être consacré à la réalisation des costumes, dans l’ambiance folle des années… folles. Au fait, nous ne pourrons jamais déterminer l’époque précise dans laquelle se déroule l’action, car les vêtements et véhicules des Trente Glorieuses font anachronisme avec la présence de smartphones et de caméras numériques par exemple.

D’autre part, j’ai apprécié l’aspect artisanal du montage et des techniques de prises de vues tendant vers l’expression d’une référence générale englobant tout le film. La caméra est généralement portée à l’épaule, et là où le réalisateur aurait dû faire des raccords pour nous montrer une scène en deux parties séparées par un angle de 180°, eh bien non, il décide de faire tourner la caméra à toute vitesse pour osciller entre les deux lieux de l’action. Chazelle, pour faire une énième référence, ne peut pas s’empêcher d’ajouter à un montage « classique » (découpages nets ou fondus), des fins de scènes où un rond apparaît au centre de l’image et, diminuant de taille, englobe les visages des deux amants.

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Les choix des couleurs

« Les couleurs [aussi sont] là pour nous raconter une histoire », ajoute Lola pour Joffre en page. « Au fur et à mesure du film, elles évoluent vers des tons plus ternes, plus « normaux », comme pour illustrer la désillusion des personnages et la transition du fantasme à la réalité. » (www.clemi.fr/fileadmin/user_upload/revuedepresse2017-lycees/RPL17_JOFFRE_EN_PAGE_4_119.pdf)

Si vous avez du temps libre, je vous conseille de regarder la vidéo du Fossoyeur de Films sur ce sujet :

La performance des deux acteurs principaux

Pour les acteurs, il s’agit d’une belle performance artistique, puisqu’ils ont dû apprendre à danser et à chanter spécialement pour La la land ; bravo Emma, bravo Ryan, vous avez fait du bon boulot. Même si quelques imperfections sont parfois décelables, le résultat est tout de même époustouflant. Une prestation en duo qui doit être vue !

Photogramme de La la land. Planetarium (1)
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Un message qui évolue tout au long du film

Pendant tout le film, les deux personnages centraux sont confrontés à un véritable dilemme : ils se trouvent peu à peu obligés de choisir entre vivre leur rêve et rester ensemble, même si ces deux solutions semblent conciliables au début du film. Le scénario traduit donc un réalisme glaçant qui se cache derrière ces idéaux de liberté absolue ; de ce fait, le film attaque avec beaucoup de tact et de lucidité un choix pris par énormément de gens depuis des millénaires. Malgré une longueur qui peut être parfois un peu ennuyante (Epilogue), je vous recommande donc vivement ce tout nouveau « chef-d’œuvre » du septième art américain.

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